En cette fin d’année, le public bruxellois a eu la chance de profiter de Kinky Boots, pour la première fois en français dans la capitale Belge. Dès les premières minutes, on sent une véritable ambition dans cette version particulièrement soignée du musical signé Cyndi Lauper & Harvey Fierstein. Pour une production locale, le résultat impressionne : décors ingénieux, des accessoires et costumes de haut vol, et une esthétique fidèle à l’esprit Broadway, témoignant d’un travail scénographique réfléchi qui connaît parfaitement les codes du musical.
La mise en scène, précise et bien rythmée, respecte le ton à la fois pop et chaleureux imaginé par les esprits créatifs de l’œuvre d’origine. Avec près de 25 artistes sur scène et une quinzaine de musiciens dans la fosse, l’énergie est palpable. Le live musical apporte une ampleur bienvenue à la partition et sublime quelques numéros emblématiques du spectacle.
Une distribution solide, portée par deS excellentes performances
La troupe, très investie, forme un ensemble cohérent et dynamique. Parmi les interprètes, Yann Joseph brille particulièrement en Charlie Price, le rôle principal. Sa voix puissante, son jeu sincère et sa présence constante (dans un rôle présent dans pratiquement toutes les scènes, ce qui ne lui laisse aucun répit) en font l’une des grandes forces du spectacle bruxellois.
Autre artiste qui se démarque : Ambre Grouwels, irrésistible en Lauren. Drôle, spontanée, dotée d’une voix remarquable, elle vole véritablement chacune des scènes où elle apparait. Son solo « The History of Wrong Guys » est l’un des moments les plus réussis de la soirée.
Du côté de la grande Lola, Bob Mobunga propose une interprétation sensible et attachante, même si le rôle (l’un des plus exigeants du répertoire contemporain) demande un charisme vocal et scénique presque surhumain. Quelques passages manquent d’impact, mais l’ensemble reste toujours chaleureux et sincère.
Un livret progressiste… avec des limites tout de même
Kinky Boots fait du bien et bouge les lignes ! Néanmoins, de manière générale, certaines réserves tiennent moins aux adaptations qu’à l’œuvre d’origine en elle-même. Si le spectacle aborde avec brio la question du spectre de la masculinité et propose de beaux moments d’ouverture d’esprit, les personnages féminins restent étonnamment peu développés. Leur présence narrative s’efface souvent derrière celle des protagonistes masculins.
De même, il peut sembler paradoxal qu’une histoire queer soit racontée principalement depuis le point de vue d’un homme cisgenre hétéro, présenté en figure de sauveur. Même si Bruxelles a mis sur scène cette histoire de manière remarquable, ce déséquilibre est inhérent au livret original. Reste que l’on passe un excellent moment malgré les légères faiblesses du livret.
Un final festif qui emporte toute la salle
La production bruxelloise de Kinky Boots tient toutes ses promesses : généreuse, colorée, entraînante. Le public, conquis, n’hésite pas à se lever et acclamer pour le numéro final. Le morceau « Raise You Up », véritable hymne fédérateur, fonctionne une fois de plus à merveille et laisse les spectateurs repartir le sourire aux lèvres.
Au final : un très beau moment de théâtre musical, énergique et d’une grande qualité, ce qui se fait trop rare sur la scène bruxelloise. Une réussite dont on ressort porté et le sourire aux lèvres.
Bonne nouvelle ! Si vous souhaitez (re)voir cette production, Kinky Boots reviendra à Bruxelles fin décembre.
