Post ! est une comédie musicale – ou plutôt trois comédies musicales en un spectacle -, construite autour de la thématique des technologies numériques. Avec une écriture intelligente et un humour sarcastique, le spectacle présente tour à tour une nouvelle application de rencontre 100% anonyme, un intelligence artificielle pour simuler un père disparu ou une conversation entre applications d’un téléphone.
Cette création originale qui ouvre la saison des comédies musicales est présentée à l’Essaïon. Sur scène, quatre interprètes et une pianiste nous présentent trois histoires technologiques dans une scénographie épurée : quelques chaises, des téléphones portables et une machine à fumée permettent de concentrer l’attention du public sur les artistes. Les trois histoires s’enchainent dans une même thématique présent-futuriste et ponctuées par des transitions maladroites.

Une partition inventive et efficace
Avant tout, il est essentiel d’applaudir le choix de la musique live au service d’une belle partition signée Alex Todo : sur scène, un piano et un synthé accompagnent tout le spectacle. Cela apporte une véritable épaisseur à la musique et une complicité palpable entre la musicienne et les comédiens – dont le chant, parfois un peu fragile, est largement compensé par la qualité de leur jeu. Ce piano met en valeur une partition originale qui comporte plusieurs belles trouvailles avec des airs en canons et un travail d’harmonie efficace.
La mise en scène de Victor Bourigault (La Tête ailleurs) présente un niveau d’aboutissement variable selon les histoires. Lors de la première histoire notamment, il est difficile de se laisser toucher par l’intrigue lorsque les acteurs demeurent face au public, statiques, se parlant sans se regarder. Le public ne sait plus s’il s’agit d’amis s’écrivant à distance ou de colocataires partageant un appartement. Une forme d’ennui, un désir de les voir se faire face ou se déplacer, finit par naître. Cela détourne le spectateur du cœur de l’intrigue amoureuse. Cette immobilité fait également perdre de la force au dénouement final, qui, au lieu d’émouvoir autant qu’il le devrait, apparaît comme la répétition d’un lieu commun prévisible. Cette sensation de longueur s’estompe pourtant vite.

De belles idées et une histoire captivante
Le véritable coup de cœur reste cependant la seconde histoire, plus aboutie que les deux autres. Elle trouve un juste équilibre entre humour et émotions, et parvient à nous surprendre jusqu’à la toute fin. Elle va plus loin que les deux autres récits : au lieu d’être le tableau d’un concept mis en musique, cette deuxième partie apporte de véritables enjeux et une tension narrative. Les deux interprètes (Axel Beros et Maud Saint-Jean) offrent aux spectateurs un jeu d’acteur particulièrement juste et prenant qui les fait passer du rire aux larmes. Cette deuxième partie justifie à elle seule tout le spectacle et pourrait se suffire à elle-même, c’est un petit bijou d’humour et de délicatesse.
La troisième histoire est un peu longue dans sa mise en place et évidente dans son dénouement couleur guimauve. Elle comporte pourtant plusieurs numéros sympathiques qui restent en tête longtemps après le spectacle. Sa force réside dans l’interprétation des quatre applications, renforcée par un travail de costumes particulièrement pertinents et adéquats qui provoquent rires et hilarité dans le public, et épousent parfaitement la narration.

Un spectacle léger à l’humour décapant
Dernier point à mentionner qui peut plaire comme déplaire : le spectacle conserve, au cours des trois histoires, un ton malicieux et légèrement ironique sans véritablement aborder la profondeur et la complexité des enjeux du numérique aujourd’hui. Au-delà du postulat que ces technologies isolent, le message reste bon enfant quand il aurait gagné en puissance, assorti d’une dimension plus politique ou militante.
Post ! Comédie musicale d’un présent proche est un spectacle tantôt émouvant, tantôt hilarant à découvrir entre amis ou en famille pour une soirée musicale réjouissante. A découvrir tous les lundi et mardi soirs jusqu’au 7 octobre 2025.