Critique : « Gospel sur la colline », le premier spectacle musical de la rentrée aux Folies Bergère

Temps de lecture approx. 5 min.
C’est avec une rentrée particulièrement chargée que la saison des spectacles musicaux à Paris débute cette année avec notamment au Théâtre des Folies Bergère, le premier spectacle musical gospel-jazz créée par Benjamin Faleyras, Gospel sur la colline. Musical Avenue est allé découvrir ce projet ambitieux avec plus de quarante-quatre artistes sur scène (comédiens, chanteurs, musiciens, danseurs) qui raconte l’histoire d’une communauté noire dans les années cinquante divisée entre le besoin de lutter contre la ségrégation raciale et le défaitisme de ce qui ont peur de perdre le peu qu’ils ont. Le tout, narré à travers une histoire d’amour contrariée et chanté au rythme du gospel, du blues et du jazz.
 

 
Tout d’abord, saluons l’initiative d’une création originale française avec des musiques et chansons originales en français. Nous savons tous l’exercice pas simple quand il s’agit de séduire un public parisien avec un spectacle musical, et la compétition en ce début d’année dans ce domaine est plutôt féroce. Gospel sur la colline se démarque par sa singularité de style musical. Ici c’est le gospel qui va vous raconter les aléas de la vie d’une petite communauté noire à la fois tiraillée par les opinions politiques et réunis par l’amour. Si l’histoire nous ramène quelques dizaines d’années en arrière, l’ambiance musicale est, quant à elle, très ancrée dans des arrangements modernes de gospel, de jazz, et de rythm’n’blues, voire rock’n’roll à des moments, soutenus par un orchestre live sur scène composé de cuivres, de percussions et de guitares qui arrose généreusement le public.
 
Les textes sont puissants de par leur simplicité, fidèle à un certain esprit gospel qui aspire tout bonnement à faire résonner les chants de l’âme et de l’Amour. C’est un enchaînement de sublimes tours de chant qui nous transporte entre l’espoir et le désespoir, l’optimisme et la désillusion, agrémenté de doses d’humour ponctuelles savoureuses. La troupe a d’ailleurs déjà enregistré un album des chansons du spectacle, disponible depuis début septembre dans les bacs.
Pour se permettre cette talentueuse troupe d’artistes, le décor, ainsi que quelques accessoires, ont été imaginés au plus simple avec comme principe de base un écran vidéo qui diffuse des images qui nous transportent d’une église, à un champ de coton, à également un cabaret haut en couleur. Les musiciens y sont intégrés de manière permanente tout au long du spectacle.
On regrette un peu ce rendu artificiel lié aux images de synthèse surtout quand le thème de l’égalité et de liberté se prêtent peut-être plus à une intention d’authenticité. Heureusement, cela s’intègre de manière harmonieuse avec des costumes d’époque aux couleurs ocre et pastel, très fleuris pour les femmes et élégants pour les hommes qui plongent le spectateur dans les années cinquante. Dommage que les musiciens n’aient pas eu le même traitement avec des costumes plus dans le thème, mais ces derniers étaient tout de même raccord avec les couleurs globales du spectacle.
 
Si les thèmes sous-jacents peuvent être particulièrement difficiles (la lutte entre les Noirs et les Blancs, l’exclusion, etc…), ici, on ne bascule jamais dans le pathos. Le parti pris est d’avoir une trame dramatique qui se concentre sur la construction d’une église pour tous, la naissance d’un amour contrarié et la réconciliation familiale. Des conflits plus "légers", malgré un fond déchirant, qui se résolvent très vite afin que le spectateur passe tout de même un bon moment, bercé par des vagues d’énergie, de douceur et de tolérance, sans tout de même oublier d’écouter le message d’espoir du spectacle énoncé par l’un des personnages principal : "Si tu ne peux pas changer le monde, change ta rue". Ici, l’ambiance reste à la fête et les personnages ne ratent aucune occasion d’y inviter le spectateur.
Ce dernier est d’ailleurs pris à partie tout au long du spectacle en commençant par l’introduction où l’un des personnages principaux, la très drôle Rebecca, interprétée par Firmine Richard, qui narre l’histoire et assure les transitions, s’adresse directement au public pour lui demander ce qu’il en pense. Le public devient petit à petit membre de cette petite communauté et est amené à participer aux numéros de chant d’église en tapant dans ses mains, à participer à la quête de la fabrication de la nouvelle église, à être mêlé aux danseurs ou chanteurs descendus prendre un bain de foule, pour devenir un véritable témoin de ce tournant dans la vie de cette communauté quand elle décide de se prendre en main pour obtenir les mêmes chances dans la vie que les Blancs.
 
Résultat, un spectacle plutôt spectaculaire qui réussit son pari d’allier au maximum une qualité artistique avec une démarche commerciale. Et encore une preuve de plus que la scène française sait écrire des spectacles musicaux de qualité qui n’ont rien à envier à nos voisins. En espérant que le public soit au rendez-vous de cette parenthèse musicale plutôt singulière au medley final qui reste encore dans toutes les têtes jusqu’à bien tard dans la soirée.
 
Crédit photo : Simon Hervé


Gospel sur la colline
 
Théâtre Folies Bergère
32 Rue Richer, 75009 Paris
 
A partir du 4 septembre pour 8 représentations
Et en tournée dans toute la France pour 31 dates
 
Créée par Benjamin Faleyras
Mise en scène par Jean-Luc Moreau
Directeur musical : Patrice Peyriéras
Produit par Thierry Berthier, Jean-Marc Bodereau et Silence! Production
 
Avec Firmine Richard, Dominique Magloire, Myra Maud, Ilan Evans, Jean-Luc Guizonne, Carla Estaque, Jean-Michel Vaubien, Marc Thomas, Philippe Vauvillé, Olivier Constantin, Manu Vince 

 

Margot Capespine

Margot Capespine

Etudiante en cinéma, c'est ce dernier qui m'a mené à la comédie musicale en visionnant les perles de l'âge d'or d'Hollywood. Le virus s'est développé avec une passion pour la version spectacle vivant de ce genre, jusqu'à envahir ma vie professionnelle puisque je produis les spectacles et parades d'un célèbre parc d'attractions dans l'est parisien. J'ai rejoint Musical Avenue et sa merveilleuse équipe en 2013 par envie de développer la légitimité et la popularisation de ce genre qui mérite d'être incontournable à Paris.
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