Sorti en juillet 2023 sur toutes les plateformes de streaming, l’album Bonnie & Clyde est une sortie attendue de longue date par les fans du compositeur Frank Wildhorn et de cette comédie musicale au destin mouvementé. Portant les voix incandescentes de Frances Mayli McCann et Jordan Luke Gage dans les rôles-titres, l’enregistrement met en lumière toute la puissance romantique et dramatique de cette partition mélodique et poignante.
Le livret du spectacle raconte l’histoire vraie et tragique de Bonnie Parker et Clyde Barrow, un couple emblématique de criminels américains durant la Grande Dépression. Dès leur rencontre au Texas, les deux jeunes rêvent de liberté, de gloire et d’évasion loin de leur quotidien morne. Mais leur quête d’émancipation les entraîne dans une spirale de vols à main armée, de meurtres et de cavale à travers le pays.
Au fil des actes, la comédie musicale explore leur relation passionnée, les tensions familiales, leur popularité croissante dans les journaux, ainsi que le dilemme moral entre amour, ambition et violence.
Frank Wildhorn, un succès hors Broadway
Compositeur emblématique du théâtre musical américain, Frank Wildhorn s’est fait connaître dans les années 1990 avec le succès populaire de Jekyll & Hyde. Doté d’un style reconnaissable mêlant influences pop, rock, gospel et classique, il s’est imposé comme une figure à part dans le paysage de Broadway. Si la critique a souvent accueilli ses œuvres avec froideur, pointant des livrets jugés faibles ou un manque de subtilité, Wildhorn a toujours su séduire un public fidèle par ses mélodies puissantes et son sens du drame musical.
Bon nombre de ses spectacles (The Civil War, Wonderland, The Scarlet Pimpernel) ont connu des carrières brèves ou difficiles à Broadway, mais il jouit d’une véritable renommée à l’international, notamment en Europe (Autriche, Allemagne, Hongrie) et en Asie (Japon, Corée du Sud), où des œuvres comme Rudolf, Dracula ou Death Note – The Musical rencontrent un franc succès.
Outre Jekyll & Hyde, il est également l’auteur de Carmen, Mitsuko ou encore The Count of Monte Cristo. Mais Bonnie & Clyde s’inscrit parmi ses spectacles les plus personnels et les plus attachants, devenu un véritable phénomène en Corée du Sud !
De Broadway à Londres : le retour d'un duo iconique
Créé en 2009 en Californie avant une courte carrière à Broadway en 2011, Bonnie & Clyde avait suscité un vif intérêt grâce à son casting original (Laura Osnes et Jeremy Jordan). Un enregistrement studio avait d’ailleurs vu le jour en 2012, mais il ne captait pas l’intégralité scénique du spectacle. Il aura fallu attendre plus d’une décennie pour que le West End offre une nouvelle version, enrichie et plus complète. En avril 2022, le spectacle débarque au Garrick Theatre à Londres dans une mise en scène de Nick Winston, et remporte un succès public qui justifie rapidement la production d’un enregistrement définitif et d’une captation vidéo.
Malgré l’attente des collectionneurs et passionnés de cast recordings, l’enregistrement n’a, à ce jour, jamais bénéficié d’une sortie physique sur CD. Disponible uniquement sur les plateformes de streaming depuis sa publication, cet album laisse un goût d’inachevé pour les amateurs de livrets illustrés, d’autant plus qu’il s’agit d’un enregistrement particulièrement abouti, tant sur le plan vocal qu’orchestral.
Une musique entre gospel, folk et pop dramatique
Frank Wildhorn, connu pour ses oeuvres aux accents pop lyriques, s’est entouré du parolier Don Black pour façonner un univers musical à la croisée des genres. La partition de Bonnie & Clyde mêle le gospel du Sud profond, le folk des années 30, et une pop dramatique qui souligne avec élégance la tension croissante du récit. Wildhorn déclare souvent avoir voulu donner à Bonnie et Clyde une voix romantique et tragique à la fois, capturant leur rêve d’évasion et leur descente inéluctable vers la chute.
L’orchestration de l’album a été réalisée par John McDaniel, collaborateur fidèle de Wildhorn. Elle fait la part belle aux cordes chaleureuses, à l’orgue Hammond et aux guitares acoustiques, renforçant l’atmosphère d’Amérique rurale et l’énergie de la cavale. L’arrangement instrumental conserve l’identité musicale du show, mais gagne en précision. Le mixage met en avant les voix avec clarté tout en préservant le relief de l’orchestre, offrant une écoutante vraiment agréable.
Un casting au sommet
Le cœur de la réussite de cet album repose en grande partie sur le duo principal :
- Frances Mayli McCann (Heathers, Evita, Les Misérables, The Great Gatsby) campe une Bonnie tour à tour rêvée et déterminée, dotée d’une palette vocale riche en nuances. Sa voix claire et expressive sublime des titres comme « How ’Bout a Dance« et surtout « Dyin’ Ain’t So Bad« , moment suspendu de l’album.
- Jordan Luke Gage (Bat Out of Hell, & Juliet, Titanique), dans le rôle de Clyde, allie fougue et tendresse, notamment dans l’inoubliable « Raise a Little Hell ». Son timbre légèrement voilé donne de l’épaisseur à un personnage à la fois violent et vulnérable.
Mention spéciale également à Natalie McQueen (Blanche) et George Maguire (Buck), dont les voix viennent enrichir les moments d’ensemble avec beaucoup d’émotion. On notera également les belles prestations des chœurs dans les scènes d’église, qui donnent un relief bienvenu aux tableaux d’ensemble.
En conclusion
Ce West End Cast Recording de Bonnie & Clyde s’impose comme une version de référence, plus aboutie que son prédécesseur américain. Grâce à un casting magnétique, une orchestration subtile et une restitution soignée de la partition de Wildhorn, il redonne ses lettres de noblesse à une œuvre longtemps boudée.
Le travail vocal et l’énergie dramatique de la musique confirment le pouvoir narratif et musical de Frank Wildhorn, souvent sous-estimé par la critique.
Le Top 3 de Nicolas
- Dyin’ Ain’t So Bad : un titre poignant de Bonnie, magnifiquement interprété par Mayli McCann. Une chanson simple mais dévastatrice par sa sincérité
- This World Will Remember Us : un duo intense entre Bonnie et Clyde qui condense toute leur ambition dans un moment de fusion vocale dramatique. L’une des signatures du spectacle !
- Raise a Little Hell : Jordan Luke Gage y est électrisant, livrant une performance vocale tendue, presque rageuse, qui illustre la descente aux enfers de Clyde avec une énergie rock assumée
Points forts
- Une partition enrichie et quasi-complète
- Des interprètes remarquables
- Une orchestration originale et soignée
- Une captation claire et dynamique
Points faibles
- L'absence d'une version physique avec livret illustré
- Un enregistrement studio trop propre
Écouter l'album
Bonnie & Clyde – Original West End Cast Recording est accessible sur les plateformes de streaming Deezer, Spotify et Apple Music.