Rencontre : Ludovic-Alexandre Vidal et Julien Salvia débriefent le showcase de "A Foreign Field" (1/3)

Temps de lecture approx. 8 min.

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Ludovic-Alexandre Vidal et Julien Salvia ont présenté le showcase de A Foreign Field à Londres le 12 novembre dernier. L’occasion pour nous de les rencontrer, et d’aborder pendant plus de deux heures le showcase, leur parcours et leur vision sur la comédie musicale.
Nous vous livrons la première partie de cette interview passionnante dans les coulisses de ce moment forcément spécial pour le duo, qui effectuait ses premiers pas dans le West End pour l’occasion.
Musical Avenue : Lundi dernier avait lieu le showcase de A Foreign Field à Londres. Quel est votre ressenti ?
Ludovic-Alexandre Vidal : C’était génial ! 
Julien Salvia : C’était une super expérience, assez stressante, mais vraiment très enrichissante. On a eu la chance de travailler avec des artistes du West End, qui ont travaillé sur de grosses productions comme WickedShowboat ou Matilda. C’était stressant, car ils avaient une semaine pour présenter deux spectacles, 40 minutes pour l’autre spectacle (Poppies, de Laura Kaye Thomson ndlr), 50 minutes pour nous. C’est peu, d’autant qu’en comédie musicale il ne faut pas juste lire les notes, il faut les jouer. Et dans la musique, il y avait beaucoup d’harmonies, beaucoup de changements de tempo à s’approprier.
L-A.V. : On n’est pas dans le « couplet refrain », ce sont des chansons très théâtrales.
Est-ce différent de travailler avec des artistes anglais ?
J.S : Ce qui m’a frappé, c’est qu’en Angleterre, tout est assez normé.
L-A.V : Plus que normé, tout est encadré par des processus. Du coup, l’efficacité est assez hallucinante. Au départ quand on a reçu le pré-planning, on s’est dit que c’était impossible que tout soit absorbé en si peu de temps. Finalement, ça fonctionne. Typiquement, lors de la répétition d’orchestre, ils ont placé 50 minutes de musique en seulement trois heures, ce qui n’est vraiment pas beaucoup. Il y avait une ambiance bon enfant. C’est paradoxal, parce que c’est très dur de créer un groupe en huit jours.
J.S : Surtout que nous sommes étrangers. Cela pourrait créer une distance, mais ça n’a pas du tout été le cas. C’était même assez drôle, car quand je donne des indications, mon côté latin ressort : je suis assez démonstratif et ça les a surpris, ça les a même fait rire. Des fois j’étais tellement excité d’expliquer ce qui me passait par la tête, que je me mettais à parler français. Ils comprenaient l’intention mais bien sûr pas ce que je disais (rires). 
L-A.V : Ce qui est assez excitant, c’est qu’on est arrivé à 9 heures du matin le lundi. A 10 heures, on était en répétition. Tu te branches, et tu ne débranches plus pendant huit jours. On a fait des changements pendant les répétitions, en ajustant certaines paroles, certains dialogues, comme on le ferait sur des avant-premières.
J.S : Après, quand tu répètes une semaine, forcément, il y a de petites imperfections. Mais ça s’est super bien passé. Je ne comparerais pas à la France : Quand on travaille avec des artistes passionnés, finalement c’est pareil.

Showcase A Foreign Field

Showcase de A Foreign Field (Source : Compte Twitter Selladoor)

Qui était présent dans le public ? Avez-vous eu des retours ?
L-A.V : Essentiellement des professionnels : d’autres producteurs (en plus des nôtres), des agents littéraires, des agents d’artistes, quelques journalistes… En somme, un petit panel de gens qui gravitent dans ce métier à Londres. On a eu quelques retours directs en sortie. A la différence des spectacles que nous montons nous-mêmes, ici c’est très différent. Comme c’est une commande de la production (Selladoor ndlr), ils sont naturellement les interlocuteurs de leurs invités. On dialogue avec la production, mais on ne gère pas le contact direct.
J.S : On a eu des retours par certains comédiens. Il y avait une personne âgée dans la salle qui nous a dit avoir été très touchée par la musique et les textes. C’était un vrai défi pour Ludovic qui a écrit lui-même en anglais.
L-A.V : C’est une expérience géniale, qui me nourrit énormément dans ce que j’écris en français. Cela représente un tel défi d’écrire dans une langue qui n’est pas la mienne à la base, que je m’éclate comme pas possible. 
Comment vous êtes-vous retrouvés sur ce projet ?
J.S : Tout a commencé avec une rencontre fin 2015 avec David Hutchinson, le directeur créatif et l’un des co-fondateurs de Selladoor.  Finalement, nous sommes abonnés aux David, puisqu’en France nous travaillons principalement avec deux David  (Rozen et Rebouh de Double D Productions, ndlr). J’étais entré en contact avec lui via les réseaux sociaux et nous avons fini par nous rencontrer.
L-A.V : On voulait lui présenter des projets que l’on voulait exporter. On s’est retrouvés autour d’un piano et on a présenté quelques chansons.
J.S : Un peu comme les David français, c’est un jeune producteur, un passionné, plein d’ambition. Dès le premier jour, il nous a proposé ce projet sur A Foreign Field, qui est un roman journalistique, pour lequel Selladoor avait les droits d’adaptation.
L-A.V : David a toujours voulu adapter cette histoire sur scène. Cela tombait bien pour le centenaire de la Grande Guerre. De plus, pour une première collaboration, c’est un super symbole que de raconter une histoire de soldats britanniques en France. A un moment, tu te rends compte que tu as la même sensibilité artistique, tu sais que tu as envie de travailler avec cette personne. La commande est venue six mois après, et on a été engagés dès l’écriture.
Comment avez-vous abordé la création ?
L-A.V : La première étape était la grosse structuration du synopsis. C’est un recueil journalistique qui n’a pas la trame dramatique d’un roman. Il a fallu remettre de l’ordre pour en faire une histoire qui tienne la route théâtralement, ce qui nous a pris quasiment un an. Ce n’est pas seulement l’histoire d’un personnage, mais d’un village, de comment il va s’abandonner à la trahison, la peur, ou au contraire l’espoir. C’est un véritable enjeu que de donner une consistance aux habitants, qui ne réagissent pas tous de la même manière. Bien sûr, il y a des personnages principaux, car le tout tourne autour d’une histoire d’amour sur laquelle s’est focalisé le journaliste. En réfléchissant avec la production, nous avons convenu d’un mode de narration assez innovant. On suit ce qui s’est passé à cette époque, parallèlement à la quête du journaliste. Les deux se confrontent sans arrêt : Par exemple, le journaliste découvre une lettre, on voyage dans le passé pour comprendre pourquoi elle a été écrite. Notre musical est basé sur les faits relatés par Ben Macintyre, même si nous avons modifié certains détails pour renforcer la dramaturgie. On a vraiment réfléchi à deux pour trouver comment construire le spectacle. Et avec la production également. Nous sommes aussi allés visiter le village de Villeret.

Julien Salvia compose A Foreign Field

Julien et Ludovic se sont inspirés du roman de Ben Ben Macintyre (Crédit photo Julien Salvia)

Avez-vous rencontré le journaliste ?
L-A.V : Oui. Il est d’ailleurs très content d’être un personnage de la pièce. On a pu approfondir certaines choses, notamment comprendre ce qui l’a passionné dans cette histoire. Comme on voulait le traiter comme un personnage, il nous fallait comprendre ses motivations personnelles.
J.S : Il ne faut pas oublier qu’on adapte un roman journalistique, c’est-à-dire factuel, sans émotion. C’était important de comprendre sa quête d’un point de vue plus émotionnel.
L-A.V : Le journaliste mène l’enquête à partir des documents qu’il trouve. Plusieurs pistes sont explorées, car les documents et les différentes sources proposent plusieurs versions.
J.S : Nous prenons le parti de ne pas dévoiler le nom de la personne qui a dénoncé les soldats. Dans des situations pareilles, tout le monde est un peu responsable. Et c’est tout le questionnement de cette pièce : qu’auriez-vous fait dans ces circonstances ? On parle quand même de véritables personnes avec leurs vrais noms. Dans la première version du livre, une personne est accusée, et dans la seconde, le journaliste reconnait son erreur.
Quelles sont les prochaines étapes ?
 L-A.V : La finalisation de l’écriture. Si tout va bien, nous irons jusqu’à la mise en production. Cela dépend un peu du showcase, mais pas seulement. A part Guess How Much I Love You, c’est peut-être la première fois que Selladoor travaille sur un projet en développement, et pas sur des titres existants.
Est-ce qu’un spectacle de cette envergure pourrait être monté en France ?
J.S : C’est vrai que c’est une grosse production : une vingtaine de personnes sur scène, des musiciens. C’est du théâtre musical assez sophistiqué, assez loin du divertissement pur que nous créons d’habitude. On pourrait peut-être le créer sur quelques dates…
L-A.V : C’est possible, dans certains circuits et sous certaines conditions. Si tu le montes dans des maisons d’opéra, avec des partenariats publics, dans des théâtres nationaux… Aujourd’hui dans des réseaux privés, c’est peut-être faisable mais…
J.S : La proportion des personnes qui vont voir des spectacles à Mogador ne sont pas tous des passionnés de comédie musicale. Ils y vont parfois pour le titre, pas forcément parce que c’est une comédie musicale. Monter des comédies musicales qui ne soient pas du divertissement pur à Paris, c’est difficile…
L-A.V : Mais je ne désespère pas… Si tu racontes une bonne histoire, quelle que soit la forme, ça fonctionne. Je reste très optimiste. La vraie complexité, c’est que le bouche à oreille joue un rôle essentiel. Il faut avoir le temps de l’installer, et donc que les producteurs aient les reins solides…
Retrouvez prochainement la seconde partie de cet entretien consacrée à leur parcours sur Musical Avenue.


Entretien réalisé le 17 novembre 2018 par Samuel Sebban
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