Rencontre : L'équipe créative de "Follies" à l'Opéra de Toulon

Temps de lecture approx. 5 min.

À l’issue la  première de Follies à l’opéra de Toulon, Musical Avenue s’est entretenu avec quelques uns des artisans à l’origine de  cette création : Jean-Luc Choplin, directeur du Châtelet, Richard Abell, le chef d’orchestre, et Olivier Bezenech, le metteur en scène.

Musical Avenue : Jean-Luc Choplin, quelle est, à vos yeux, la place de Stephen Sondheim dans l’univers du musical ?

Jean-Luc Choplin : Sondheim est le dernier grand compositeur de comédie musicale de l’ancienne génération qui plonge ses racines en Europe de l’Est et a su fusionner la culture musicale classique avec celle de Broadway. À la base c’est un "minimaliste" de la veine des compositeurs américains du XXème siècle comme Steve Reich ou John Adams, un style de composition utilisant la répétition comme technique. Mais tandis que les autres ont persévéré  dans ce style, disons expérimental, lui a bifurqué vers le théâtre musical qui séduit et donne du plaisir au public. Peu à peu il a intégré à sa musique tous les styles, classique comme Puccini ou Wagner, mais aussi folk, spiritual, jazz. Malheureusement, on ne voit pas trop aujourd’hui un compositeur capable d’assurer la relève.

Musical Avenue : David Abell, vous avez dirigé d’innombrables opéras à la tête des plus grandes formations, mais vous êtes également un passionné de comédie musicale. Vous avez dirigé Sweeney Todd au Châtelet en 2011 et vous revenez en avril pour diriger Sunday in the Park with George (NDLR : actuellement à l’affiche). Qu’est ce qui, selon vous, caractérise Follies ?

David Charles Abell : Sondheim est avant tout dramaturge – il utilise un style différent pour chacune de ses œuvres. Il adapte sa musique aux personnages, aux ambiances, aux situations. Follies a été composé en 1970, à une époque où le théâtre musical était en pleine effervescence expérimentale. Et cela coïncidait aussi avec la naissance de la psychanalyse. Sondheim a voulu faire quelque chose de nouveau et dans l’air du temps.  Ainsi, Follies est un drame psychologique entre quatre personnages qui se trouvent confrontés à l’échec de leur vie. Mais, en même temps, il a voulu coller à la grande histoire de Broadway. Et toutes les chansons sont des pastiches en hommage à Broadway. "Loosing my mind" est un pastiche de Harold Arlan (Le Magicien d’Oz).  "Rain on the Roof" est un hommage à Cole Porter. "One More Kiss" est écrit dans le style opérette caractéristique de Siegmund Rombert (The Desert Song).

Musical Avenue : Olivier Bénézech, comment avez-vous fait pour constituer votre  troupe?

Olivier Bénézech : Nous sommes allés à Londres, David Abell, Claude Bonnet et moi-même. Nous avons fait passer des auditions pendant une semaine. Londres est l’endroit au monde où l’on trouve la plus grande concentration d’artistes merveilleusement talentueux. Nous avons eu la chance de pouvoir engager des pointures exceptionnelles. Graham Bickley (Ben), Charlotte Page (Sally), Liz Robertson (Phyllis) sont tous des grandes stars du West end.

Musical Avenue : Y a-t-il en France des artistes capables de jouer dans des comédies musicales ?

Olivier Bénézech : Il commence à y avoir de bonnes écoles et, oui, nous avons aussi en France de grands professionnels, parfaitement bilingues. Jerôme Pradon (Buddy), Denis d’Arcangelo (Solange Lafitte) et Nicole Croisille (Carlotta Campion) n’ont pas été auditionnés. Nous les voulions. En France, nous avons des artistes, mais pratiquement pas de producteurs et guère de compositeurs.

Musical Avenue : La comédie musicale vous est familière. Vous avez mis en scène Street Scene, Un violon sur le toit, Grease…  C’était important pour vous d’ajouter Sondheim à votre palmarès ?

Olivier Bénézech : Je suis extrêmement fier et honoré de pouvoir créer une œuvre de Sondheim. On ne trouve ni en France, ni dans le monde, aujourd’hui, un compositeur de cette classe. Et c’est bien là le problème. À Londres, à New York, on voit pas mal de créations, mais ce ne sont souvent que de « revivals ». Là-bas, les spectacles doivent être rentables. Les comédies musicales de Stephen Sondheim n’étant pas rentables, elles sont jouées avec des réductions d’orchestre. La France est le seul pays capable de présenter des œuvres de Sondheim telles qu’elles ont été écrites. En avril, le public parisien pourra voir Sunday in the Park with Georges écrit par Sondheim, cette fois,  pour une petite formation de 11 musiciens. Du coup, c’est l’inverse qui se produit : la version qui sera présentée du 15 au 25 avril prochain a été réorchestrée spécialement pour le Châtelet, pour être jouée par 46 musiciens. Par conséquent, je crois que Sondheim, lui aussi, est très fier et très honoré d’être joué en France.

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