Après le film de 1992 réalisé par Kenny Ortega (Dirty Dancing, High School Musical), Newsies devient une comédie musicale qui vient d’être couronnée de succès à Londres, notamment pour ses chorégraphies époustouflantes. Inspiré d’une histoire vraie, ce spectacle met en lumière le courage et la détermination des jeunes vendeurs de journaux de New York au 19e siècle. Nous avons rencontré Maëliss Aguillon, qui présentera une version en français dans le cadre de son TFE.
Note de la rédaction : cet article est présenté comme une retranscription des échanges avec les cheffes de projet, sous forme de questions/réponses ; nous conservons volontairement certaines formulations orales dans les lignes qui suivent.
Musical Avenue (M.A.) : Pouvez-vous nous parler de votre passion pour les comédies musicales ?
Maëliss Aguillon (Maëliss) : Ma passion pour la danse a commencé dès l’âge de 2 ans et demi, et cela est devenu une partie essentielle de ma vie. À l’âge de 10 ans, j’ai eu l’opportunité incroyable d’incarner le rôle de Nala enfant, pour la version française du Roi Lion présentée pour la première fois à Mogador. C’est là que mon véritable engagement pour les comédies musicales a commencé à s’enraciner.
J’ai poursuivi mes études classiques en obtenant mon baccalauréat littéraire, puis j’ai suivi une licence en anglais-japonais. J’ai ensuite passé six mois aux États-Unis pour reprendre des cours de danse, mais la pandémie de COVID-19 a bouleversé mes plans et je suis revenue en France sans vraiment savoir quelle direction prendre. C’est à ce moment-là que l’idée de revenir à la comédie musicale a germé, d’autant plus que j’avais repris la danse à un bon niveau. La formation complète offerte par le Cours Florent m’a particulièrement séduite, notamment grâce à son équilibre entre le chant, la danse et le jeu d’acteur. Au fur et à mesure de la formation, l’envie de monter un TFE était de plus en plus présente, d’autant qu’on rencontre plein de gens passionnés. Le Cours Florent nous permet de créer quelque chose d’unique en mettant des salles à notre disposition, l’appui des professeurs, une régie… J’avais envie de saisir cette opportunité.
M.A. : Pourquoi avoir choisi Newsies en particulier pour TFE?
Maëliss : Parce que c’est une évidence pour moi, c’est une passion. À l’origine, je ne savais même pas que c’était lié à Disney, malgré mon lien depuis l’enfance avec l’univers Disney. Mon choix pour Newsies est authentique, c’est un vrai coup de cœur. Ce qui me touche profondément dans cette œuvre, c’est l’histoire des enfants qui se battent pour faire entendre leur voix, pour obtenir leurs droits. Cette thématique résonne en moi et évoque la réalité des jeunes dans notre société contemporaine. Parfois, en tant que jeunes, il est difficile de se faire entendre, de gagner la confiance des adultes et d’avoir l’opportunité de mettre en pratique nos idées.
C’est aussi la place des femmes et des personnages forts qui m’intéresse et m’inspire. Katherine Plumber s’affirme comme journaliste en dépassant les obstacles ou les préjugés paternels, et s’impose, même dans un environnement principalement masculin. Même chose pour Medda Larkin qui gagne son indépendance et fait preuve de détermination. Ces valeurs me sont chères. D’ailleurs, le casting est majoritairement féminin ; même si initialement l’œuvre est portée par des hommes, on peut tout autant réaliser de grandes choses et beaucoup de TFE sont dirigés par des femmes cette année.
M.A. : Comment avez-vous constitué votre casting ?
Maëliss : J’ai la chance d’avoir plus d’une vingtaine d’artistes sur ce projet. Pour certains rôles, j’avais déjà des personnes en tête et je les ai directement abordées pour leur proposer de rejoindre l’aventure. En revanche, pour d’autres rôles, je n’avais pas d’idées précises. Nous avons donc organisé des auditions, où les candidats devaient présenter une chanson correspondant au personnage qu’ils souhaitaient interpréter. Pour la troupe des Newsies, la sélection s’est faite en fonction de leur motivation. À mes yeux, un projet ne peut être mené à bien que si tous les participants sont réellement motivés. Même pour les personnes que j’ai sollicitées personnellement, j’ai insisté sur leur désir de s’impliquer. La motivation peut déplacer des montagnes et est essentielle pour le succès de tout projet.
M.A. : Comment s'est déroulée la création et quelles étapes avez-vous franchies jusqu'à présent ?
Maëliss : Cela fait plus d’une année (depuis l’été 2022) que j’ai commencé à travailler sur ce projet. L’une des premières étapes a été la traduction complète de toutes les chansons et du livret, qui m’a pris tout l’été. Je tenais à pouvoir présenter le spectacle en français. Le surtitrage a été envisagé pour les chansons mais je ne suis pas en faveur de cette solution, car cela réduit la concentration du public ; les yeux sont constamment en mouvement entre la scène et l’écran. Je pense à tous les publics, y compris les différentes générations, tels que mes grands-parents et mes parents. Lorsque les chansons sont en anglais, il peut être difficile pour ceux qui ne maîtrisent pas la langue de comprendre le contenu. Le surtitrage crée une barrière et impose aux personnes non anglophones de suivre les sous-titres pour apprécier le spectacle. Newsies est déjà riche en musique et en danses, je veux que le spectateur puisse profiter au maximum des performances des comédiens pour vivre pleinement l’expérience.
M.A. : Avez-vous apporté des modifications à l'intrigue ou choisi de supprimer certains passages ?
Maëliss : Étant donné que nous n’avons pas d’entracte, j’ai choisi de supprimer des passages plutôt que des scènes entières pour resserrer la présentation. J’ai également pris la décision de couper certaines chansons d’amour entre les personnages de Jack et Katherine. Je pense que ces relations peuvent être interprétées différemment grâce à la mise en scène, ce qui nous permet de nous concentrer davantage sur le message principal du spectacle.
En travaillant sur cette adaptation, nous avons réussi à maintenir une durée d’environ 1h45 de spectacle. Bien que j’aie effectué des coupes pour rendre l’ensemble plus dynamique, il reste encore suffisamment de matière pour captiver le public. Cependant, la résidence n’ayant pas encore eu lieu, je reste ouverte à la possibilité de couper davantage ou d’ajuster certaines parties du spectacle en fonction du rendu global. Mon objectif premier est de mettre en avant le thème de la lutte pour les droits et de souligner la place des femmes dans la société. L’aspect romantique de l’histoire n’est pas au cœur du propos, et je compte sur la mise en scène pour exprimer les relations entre les personnages de manière subtile.
M.A. : Newsies c’est un mélange entre des chorégraphies précises, des numéros d’ensemble et des chansons émouvantes ; quelles sont vos inspirations pour créer tout ça ?
Maëliss : Pendant la préparation, j’ai organisé un voyage scolaire avec les membres de l’équipe. À neuf, nous nous sommes rendus à Londres pour assister à une représentation de Newsies. Ce voyage nous a permis de ramener de nombreuses idées pour les chorégraphies, et nous avons réparti le travail entre nous pour créer les différents tableaux. En tant que chorégraphe principale, je supervise la majorité des choix de danses, pour mêler des numéros aux ensembles dynamiques et des séquences de claquettes.
Nous construisons aussi nous-mêmes les tables et tabourets notamment pour la scène « King of New York ». J’ai constaté qu’il me manquait le matériel nécessaire au Cours Florent pour réaliser la chorégraphie que j’ai imaginée. J’ai la chance d’avoir le soutien de mon copain pour tous ces aspects de bricolage. Les costumes sont gérés par ma tante, qui est couturière et se charge de les confectionner. Cependant, pour les accessoires et les matières premières, nous avons lancé une cagnotte en ligne (le lien pour soutenir le TFE est ICI) pour permettre à ceux qui croient en notre projet de nous soutenir financièrement. Nous faisons de notre mieux pour optimiser les ressources, en utilisant des costumes et accessoires de récupération ou d’occasion, et en achetant des accessoires via des plateformes en ligne. Il n’y a que deux représentations prévues sur une journée et le budget est vite limité.
J’ai aussi pu choisir le lieu de représentation. La salle Huster est mieux adaptée que le plateau Max Ophüls par rapport à ce que j’avais en tête. Même si l’acoustique n’est pas la meilleure, le lieu a naturellement un côté plus industriel urbain qui marche très bien, et qui donnera l’impression que la troupe des Newsies investit l’espace.
M.A. : Avez-vous des anecdotes à nous partager ?
Maeliss : Oui j’en ai quelques unes qui me viennent en tête. Par exemple, j’ai remarqué que les portes de la salle Huster ont tendance à claquer fortement ; je vais essayer de demander à plusieurs personnes de venir gérer les ouvertures et fermetures de porte pour les artistes, et que le public ne soit pas dérangé pendant la représentation. Les spectateurs ne s’en rendront peut-être pas compte mais il se passera autant de choses derrière la scène que devant leurs yeux.
Pour le tournage du teaser (à retrouver ci-dessus), une expérience mémorable nous a marqués. Le tournage s’est déroulé en hiver, avec des températures ressenties proches de -7°C. Nous avons filmé fin novembre/début décembre pour les rushs. Pour faire face au froid intense, j’avais prévu des chauffes-mains, des couvertures, des plaids, du café et du thé, mes camarades ont été très courageux. J’avais aussi prévu de tourner des mini-scènes en extérieur dans le métro, et ça a été particulièrement amusant. Je voulais donner l’impression que le métro est en mouvement, mais en réalité il fallait tout filmer à quai pendant l’arrêt en station. Nous avons tourné un soir après 20h30 pour minimiser la présence de passants. L’expérience était à la fois amusante et excitante, je me souviens que je me précipitais hors du métro puis dedans pour créer la sensation de mouvement, c’est un souvenir unique.
M.A. : Que peut-on vous souhaiter pour les prochaines semaines ?
Maeliss : Nous allons pouvoir concrétiser un maximum de choses avec la résidence qui arrive (NB : la résidence n’avait pas encore commencé au moment où nous avons réalisé l’interview). C’est un moment clé où nous allons être tous réunis pour la première fois. Jusqu’à présent, en raison du nombre de personnes impliquées, j’ai travaillé avec des groupes ou en individuel, ce qui a nécessité beaucoup de vidéos et de communications à distance. Je vais synchroniser tout ça et je pense que ces rencontres d’énergie vont créer de beaux moments. Il reste beaucoup de travail mais je suis plutôt organisée et dès le début je savais où j’allais. Avoir pu participer aux spectacles de fin d’année (Cabaret et Rent) m’aide aussi pour avoir la vision de comment monter un spectacle en si peu de temps. Au final, j’aime autant être sur le plateau que dans les coulisses. J’ai toujours trouvé gratifiant de voir mes amis briller sur scène et de contribuer à mettre en valeur leurs talents. Les TFE nous offrent cette opportunité de collaborer et de soutenir nos camarades, j’ai hâte de présenter le résultat et de faire apprécier tout le travail que l’on fait.
Pour participer à la cagnotte, c’est par ICI
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