Rencontre : Ned Grujic, metteur en scène de "La Famille Addams – La comédie musicale"

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Ned Grujic vient de finir de faire passer les auditions pour La Famille Addams – La comédie musicale. En plus d’être un des metteurs en scène les plus présents ces dernières années, il y a trois ans il a pris la tête de l’ECM (Ecole Comédie Musicale). Un long chemin parcouru pour ce comédien à l’origine.

Musical Avenue : La concurrence à Paris en cette rentrée 2017 va être rude, en quoi La Famille Addams va t’elle sortir son épingle du jeu?

Ned Grujic : La Famille Addams peut tirer son épingle du jeu car c’est une « musical comedy », elle s’apparente plus à un vaudeville, et est plus proche du théâtre de boulevard, classique en France. L’intrigue est un peu légère, mais la saveur ce sont tous ces personnages et cette famille particulière qui se confronte à des gens beaucoup plus ordinaires. Cette rencontre crée des quiproquos qui vont ressembler au vaudeville. À la rentrée, il n’y a pas beaucoup de « vaudeville musical ».

Qu’est ce qui va changer par rapport à la mise en scène originale à Broadway ?

Ned : Déjà, on va travailler plus pour la sensibilité francophone avec des références françaises. On va avoir une scénographie différente de Broadway car notre décor sera le manoir des Addams, qui s’ouvre, se ferme, tourne… Une maison de sept mètres de haut qu’on va essayer de faire rentrer sur la scène du Palace ! Et travailler sur les mécanismes de la comédie à la française. Ce que j’aime dans La Famille Addams c’est tous les contrastes entre les personnages, et la fresque qu’ils forment. C’est à la fois un grand spectacle et à la fois intimiste, un peu comme Frankenstein Junior, même si ce n’est pas le même humour, mais le même décalé. On est plus dans le théâtre musical que dans un show façon Broadway.
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Quel regard portes-tu sur la distribution qui est assez jeune, surtout Stéphanie Gagneux qui joue la grand mère ?

Ned : C’est vrai, le but c’est d’aller dans la composition. Stéphanie Gagneux a énormément travailler avec Omar Porras qui est un grand metteur en scène de masques. Ce sont des personnages de bande-dessinée plus que des personnages psychologiques. Ce qui m’intéressait ce n’est pas tant l’âge des comédiens, mais plutôt leur singularité. On a vraiment affaire à une bande de « freaks » , donc prendre une comédienne qui est toute petite, qui a un physique très graphique, anguleux, qui a une voix particulière c’était évident. Comme Laurent Connoir qui joue Fétide, ce sont des personnalités et des types de comédiens qui sont complètement à leur place dans ce genre de distribution et de spectacle.
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Est-ce plus compliqué de juger les élèves de l’ECM comme tu es le directeur de l’école ?

Ned : Non, pas plus compliqué, dans le sens où tout le monde passe les auditons. Je suis leur directeur, je les connais, mais je suis entouré de gens qui ne les connaissent pas ou très peu, qui les ont peut-être vus sur scène à un spectacle de l’école. Même si c’est le metteur en scène qui prend la décision finale, les auditions de comédies musicales particulièrement, se font à plusieurs, il y aussi la partie chorégraphique, la direction musicale, vocale. D’autant plus qu’avec mon expérience, je connais énormément de gens qui viennent auditionner, et même si je ne connais pas tous les jeunes artistes qui arrivent, c’est toujours intéressant de les rencontrer. C’est aussi difficile que d’auditionner des gens du métier qu’on connait. Je pense être assez objectif et assez exigeant professionnellement pour prendre les gens qui, à mon sens, doivent être à cette place là.

Quels sont tes rapports avec Lorenzo Vitali, et quelles sont les marges de manoeuvre que tu as pour l’adaptation de La Famille Addams?

Ned : Avec Lorenzo Vitali, c’est un compagnonage depuis plusieurs années, ça n’a pas toujours été évident mais ce que j’aime chez lui c’est qu’il est très audacieux. Le revers de l’audace c’est qu’on y perd des plumes. Je lui suis très reconnaissant car grâce à lui j’ai pu monter des oeuvres incroyables, Fame, Hair, Hairspray, Frankenstein Junior, Shrek. Ce qui est agréable avec lui c’est qu’il fait complètement confiance. C’est un producteur indépendant, à l’inverse de Stage Entertainment qui est une entreprise où c’est des grosse équipes, grosses finances, Lorenzo va chercher ses propres sous, il prend des risques, parfois il dépose le bilan… Mais on a besoin de gens comme ça, un peu fous, pour pouvoir monter des projets. Vous parliez de concurrence tout à l’heure, mais pour moi ce n’est pas de la concurrence encore, on n’en est pas à ce stade là à Paris. Plus on est de gens à faire du musical, plus ça va pousser le genre et plus ça va le développer. Toute comédie musicale a sa place à Paris pour l’instant, on n’est pas encore à Broadway ou dans le West-End, où il y a vingt-cinq grosses comédies musicales, même si aujourd’hui c’est difficile aussi là-bas. C’est bien qu’il y ait différents types de spectacles, c’est ce qui donne une effervescence. Mon rapport avec Lorenzo est là, des rapports d’amitiés aussi. Il m’a apporté des choses et j’ai pu lui apporter des choses aussi. Je suis très content de re-collaborer avec lui pour La Famille Addams, c’est quelqu’un qui donne sa confiance, et c’est comme ça que je travaille aussi. Pour faire une belle création artistique, il faut que chacun soit à sa place et qu’on se fasse confiance. Lorenzo n’interviendra jamais dans l’artistique, financièrement oui, pour dire ce que l’on peut faire. C’est très agréable, je n’ai pas de compte à lui rendre artistiquement. Ce sont plus les américains qui regardent l’adaptation ! Lorenzo connaît mon travail. On attend la réponse des américains. Ce qu’ils font, c’est retraduire en anglais l’adaptation pour voir si on reste dans les clous, même si on adapte, ils le savent. La réponse ne devrait pas tarder, j’attends avec impatience de pouvoir faire des lectures et de voir comment ça sonne. Pour les chansons, j’ai eu la chance que les artistes qui ont auditionné aient pu chanter les adaptations, et j’ai vu ce qui marchait ou pas. Une adaptation, il faut faire attention à la sonorité, que ce soit proche de la langue d’origine, du groove, la prosodie juste, ne pas être tenté de rajouter des syllabes pour faire rentrer une phrase, faire attention aux américains qui des fois sont plus dans le son que dans le sens de la phrase. C’est un travail passionnant, très phagocitant, on peut y passer des nuits blanches. Sur La Famille Addams, c’est un peu plus pop que du classique Broadway, il fallait trouver un son dans la vocalité, qui se rapproche de ce style. J’ai eu la chance d’être entouré de Raphaël Sanchez, que j’ai beaucoup embêté pour avoir son avis. C’était une belle collaboration. On est toujours meilleurs à plusieurs, je le dis et je l’enseigne à mes élèves.

A l’origine tu étais plus un homme de théâtre, qu’est-ce qui t’a ammené à la mise en scène, et à la mise en scène de comédie musicale?

Ned : La comédie musicale m’a toujours passioné, comme beaucoup. J’ai fait plus des études de théâtre, en même temps je prennais des cours de chant. J’ai commencé très tôt à jouer en tant qu’interprète dans des comédies musicales. A l’époque c’était un genre très moribon, maintenant il l’est moins, mais il reste encore pour les professionnels du théâtre quelque chose de trop léger, donc j’espère qu’on arrivera un jour ou l’autre à devenir beaucoup plus crédible, même si ça commence à venir. J’ai toujours travaillé avec la musique, ça a toujours été quelque chose d’important. Dans mes premières mises en scène de théâtre, la musique avait énormément de présence, j’ai toujours mis des chansons dans mes spectacles. J’ai commencé par monter beaucoup de Shakespeare, c’est mon auteur de prédilection, j’y reviens sans arrêt. D’ailleurs je viens de créer une comédie musicale d’après « Le Songe d’une nuit d’été » qu’on reprendra à Paris à la saison 2018-19. J’ai monté des classiques dans lesquels je mettais des chansons, ce qui petit à petit m’a amené à la comédie musicale. J’ai été dans les premiers à monter des spectacles jeune public avec un peu plus que deux personnes, en 1994 j’ai décidé de monter Le Chat Botté en comédie musicale et ils étaient huit sur le plateau. Je suis content que plein de gens aient fait la même chose, ce qui a permis au courant de la comédie musicale d’investir le genre et d’anoblir le genre du jeune public qui n’est pas encore super reconnu par les professionnels du théâtre, alors que ce sont nos futurs spectateurs et il faut leur donner déjà ce goût-là. Que des enfants de 2-3 ans aient des spectacles où la chanson est un guide vers la dramaturgie, ça les rend réceptifs à ce genre. Finalement, je ne suis pas metteur en scène de comédie musicale par hasard, plus jeune j’étais surveillant dans une école et j’ai monté une activité théâtre puis comédie musicale. Mon spectacle déclencheur c’est Oliver Twist que j’ai monté en 1998, un piano voix avec dix comédiens, qui a tourné et joué à Paris. Ce spectacle a eu beaucoup de succès, les gens ont dit voir arriver Londres à Paris, car à l’époque il y avait des spectacles de variétés, sans être péjoratif chaque genre a ses qualités, comme Notre-Dame de Paris et Le Petit Prince. Oliver Twist avait été créé avec un producteur indépendant qui se battait pour la comédie musicale. Il avait créé un festival qui s’appelait « Les Musicals », avec des trophées, qui n’a pas perduré malheureusement, mais il y a d’autres trophées qui arrivent (Les Trophées de la Comédie Musicale, ndlr) c’est super ! Puis lorsque Lorenzo Vitali est arrivé pour Fame, il cherchait un jeune metteur en scène et les gens ont parlé de moi grâce à Oliver Twist. Plein de propositions de comédies musicales ont suivi, parrallèlement j’ai travaillé avec des compagnies qui faisaient de l’opéra, j’aime voyager dans divers univers, j’ai travaillé avec des artistes lyriques, de théâtre pur ou de comédie musicale, et je continue parce que c’est toujours passionnant de travailler avec des artistes qui viennent d’univers différents.
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Comment t’es venu l’enseignement puis la direction de l’ECM ?

Ned ; J’ai beaucoup enseigné il y a quelques années, j’ai arrêté car c’est difficile de tout faire en même temps. Guillaume Bouchède qui était le directeur m’a fait venir dans son école pour donner des cours de théâtre. Ca faisait cinq ans qu’il était à la direction et il avait besoin de se consacrer à ses projets personnels aussi, parce que c’est beaucoup de travail et d’investissement, il m’a proposé de reprendre la direction. Je n’ai pas dit oui tout de suite, je suis un peu plus âgé que lui, je sais le travail que c’est. J’y ai beaucoup réfléchi, et je me suis dit que c’était intéressant après toutes ces années de métier de pouvoir transmettre aux artistes de la génération montante, tout ce que j’ai pu apprendre et les faire devenir les artistes que je recherche en tant que metteur en scène. Entre pédagogie de cours et formation à être sur scène, l’idée est qu’à la sortie de l’ECM, les élèves soient tout de suite prêts à jouer dans un spectacle, qu’ils aient l’endurance nécéssaire. Pendant trois ans ils cravachent beaucoup. Je suis content du rayonnement qu’a l’école, et il n’y a pas que moi qui travaille pour. Je fais bosser certains de mes élèves, mais c’est au mérite, et au travail qu’ils font quand ils vont passer une audition. Ce sont des interprètes, c’est important. C’est ce qui parfois pouvait manquer dans ce que je voyais chez les jeunes pendant les auditions avant, ils étaient bon danseur, bon chanteur, mais ne correspondaient pas au modèle anglo-saxon où ce sont d’abord des comédiens. La comédie pour moi est très important. Pour avoir parlé avec d’autres metteurs en scène, les élèves de l’ECM correspondent plus à ce que les uns et les autres cherchent. Et je le souhaite pour toutes les écoles, ce n’est pas le cas partout, c’est compliqué de mettre en place un programme pédagogique, il y a beaucoup de responsabilité à faire sortir des gens sur le marché. On ne veut pas en faire sortir plus de 15 par an, on est une petite école et on ne s’élargira pas plus. On travaille dans l’humilité, l’artisanat, c’est important pour nous. Mais il y a de jeunes artistes formidables qui sortent d’autres formations et d’autres écoles, ça m’intéresse aussi de travailler avec eux. Sur d’autres spectacles sur lesquels je travaille, il n’y a pas une majorité d’élèves de l’ECM, comme Le Livre de la Jungle par exemple où il n’y en a qu’une. C’est une question de rester objectif, professionnel et exigeant. C’est important qu’on puisse les former sur les exigences actuelles du métier, c’est pour ça que les profs à l’ECM sont en activité pour apporter le maximum d’armes aux étudiants. Le manque de formations à la comédie musicale a manqué à ma génération, beaucoup allait travailler en Allemagne. Les jeunes maintenant ont de la chance d’avoir ces écoles où ils sont pris en charge complètement. Ils travaillent comme des fous, ils apprennent la discipline, la ponctualité, et le respect envers les gens qui travaillent. C’est important d’avoir une vraie fraternité entre les gens et pas être dans la jalousie et l’envie.
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La Famille Addams – La comédie musicale, de Marshall Brickman et Rick Elice
Du 15 septembre au 31 décembre 2017
Au Théâtre Le Palace
8 rue du Faubourg Montmartre – 75009 Paris
Paroles et musiques : Andrew Lippa ; Décors : Massimiliano Merenda ; Costumes : Inzillo Sweet Mode SRL ; Lumières : Maurizio Montobbio ; Son : Armando Vertullo ; Chorégraphies : Julie Ledl ; Direction Vocale et Musicale : Raphael Sanchez ; Mise en scène : Ned Grujic ; Assistant Mise en Scène, Assistant Chorégraphie, Dance Captain & Swing : Christopher Lopez

Avec : Vincent Gilliéron, Guillaume Bouchède, Charlotte Hervieux, Simon Gallant, Lucie Riedinger, Magalie Guerrée, Laurent Conoir, Stéphanie Gagneux, Dalia Constantin et Cyril Romoli
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