C’est l’un des albums les plus vendus de tous les temps (43 millions d’exemplaires !), pas étonnant donc qu’un spectacle lui rende hommage. À vrai dire, Bat Out of Hell avait été conçu dès le départ pour la scène, bien avant de devenir l’album culte de Meat Loaf sorti en 1977. Il aura fallu près de quarante ans pour que le rêve de Jim Steinman prenne vie sous forme d’opéra rock. Après une première production à Manchester puis à Londres en 2017, une résidence à Las Vegas, des tournées nord-américaine et internationale, cette adaptation scénique survoltée est à nouveau en tournée à travers le Royaume-Uni jusqu’à l’automne.
Si vous êtes fan de l’œuvre de Jim Steinman, de sa musique qui monte en puissance, de ses « power ballads » grandioses et de son goût pour le drame, Bat Out of Hell à tous les ingrédients pour vous plaire. En signant aussi le livret, le prolifique compositeur a insufflé toute la fougue de son style : des passions dévorantes, un esprit de rébellion et un imaginaire unique.
Une comédie musicale dystopique
Inspirée librement de Peter Pan, l’histoire nous plonge dans un monde futuriste dévasté. La ville d’Obsidian est gouvernée d’une main de fer par Falco, un tyran qui garde sa fille Raven sous étroite surveillance. Mais tout bascule lorsqu’elle rencontre Strat, le chef charismatique des Lost, un groupe de jeunes rebelles figés à jamais à 18 ans. Entre eux naît un amour interdit qui viendra ébranler l’ordre imposé et rallumer la flamme de la révolte.

D’abord pensée comme une comédie musicale dystopique nommée Neverland, Bat Out of Hell s’est construit autour d’un thème central : celui de jeunes qui refusent de grandir, à l’image des « Lost Boys » de J. M. Barrie. Comme Tanz der Vampire (Le Bal des Vampires), dont Steinman a également signé la musique, l’histoire explore des thèmes chers au compositeur : l’immortalité, les passions contrariées et l’élan tragique de la jeunesse en marge. Le tout porté avec la même intensité, mais aussi un regard décalé, qui laisse place à des touches d’humour et à un kitsch pleinement assumé.

Le résultat est flamboyant. Des scènes percutantes s’enchaînent au rythme de chorégraphies endiablées et de performances dignes d’un véritable concert rock. Les artistes se donnent sans réserve pour rendre justice aux légendaires chansons de Steinman, popularisées par Meat Loaf. C’est un pur plaisir de les voir prendre vie sur la scène, réinterprétées dans le contexte de l’histoire.
couples, passions et rock'n'roll
L’un des meilleurs exemples reste « Paradise By The Dashboard Light », tirée du premier opus. Dans le spectacle, cette scène oppose les parents de Raven, Falco (Rob Fowler) et Sloane (Sharon Sexton). Leur performance audacieuse sur une voiture rétro est tout simplement incroyable, mêlant énergie brute, séduction et un sens du spectacle parfaitement maîtrisé. Rob Fowler impose sa magnétique présence rock, tandis que Sharon Sexton captive par son charisme, campant une Sloane à la fois vulnérable et déterminée.

Couple dans la vie – ils se sont rencontrés à Manchester lors de la première production -, Fowler et Sexton livrent également une interprétation très poignante de la nouvelle chanson « What Part of My Body Hurts the Most » que Steinman a écrite spécialement pour le spectacle. Celle-ci, véritable « instant classic », est un superbe ajout à la trame de la pièce.

Lors de la représentation à Londres à laquelle nous avons assisté, James Wilkinson-Jones a assuré le rôle de Strat en remplacement de Glen Adamson. Avec sa voix puissante et son jeu intense, il a littéralement enflammé la scène, incarnant brillamment l’ardeur et le mystère de ce personnage hors norme. Le jeune artiste semblait prendre un réel plaisir à camper ce rôle pourtant très exigeant, notamment dans sa performance électrisante de « Bat Out of Hell » qui conclut le premier acte. À ses côtés, Katie Tonkinson, dans le rôle de Raven, a offert une interprétation pleine de nuances, marquée par une alchimie palpable avec son partenaire qui rendait leur relation crédible.

Même émotion partagée pour le troisième duo amoureux au cœur de l’histoire : Ryan Carter (Jagwire) et Georgia Bradshaw (Zahara). Ils ont, eux aussi, touché le public avec leur histoire d’amour à sens unique, bien incarnée dans la chanson « Two Out of Three Ain’t Bad ».
Impossible bien sûr d’inclure toutes les chansons de la trilogie Bat Out of Hell qui s’étend de 1977 à 2006, mais le choix d’intégrer « Objects in the Rear View Mirror May Appear Closer Than They Are » mérite d’être salué. Véritable pépite d’émotions, ce titre est partagé par les personnages de Jagwire (Ryan Carter), Ledoux (Luke Street) et Valkyrie (Carly Burns), qui, tour à tour, se remémorent leurs souvenirs.
Bat Out of Hell est sans doute l’un des rares spectacles du genre à en mettre autant plein la vue – et les oreilles – dans tous les sens du terme. Entre les vibrations puissantes de l’orchestre et les prouesses vocales des artistes qui prennent aux tripes, il est difficile de ne pas se laisser emporter dans son univers renversant pour vivre une expérience vraiment grisante. Une décharge d’adrénaline rock’n’roll qui brûle les planches et résonne longtemps, comme un refrain obsédant dont on ne se lasse pas !
Cliquez ici pour voir toutes les dates de la tournée UK 2025