Rencontre : Delphine Grandsart, lauréate du Trophée de la Comédie Musicale "Artiste Interprète Féminine" 2018

Temps de lecture approx. 13 min.

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Le mois dernier, Delphine Grandsart a été récompensée aux Trophées de la Comédie Musicale pour sa prestation unanimement saluée de Louise Webber dite La Goulue. Pour l’occasion, nous sommes allés à la rencontre de cette artiste atypique dans le paysage de la comédie musicale.

Les Trophées de la Comédie Musicale Artiste Interprète Féminine

Musical Avenue : Où étais tu quand tu as appris ta nomination aux Trophées de la Comédie Musicale ?

Delphine Grandsart : J’étais chez moi, donc j’ai du l’apprendre par Facebook. Pas mal de gens m’ont envoyé des messages par la suite, ils étaient super contents. Même pour nous, c’était tellement inattendu. Comme on n’a pas de producteur, les Trophées pour nous c’était énorme. Ils ont été très curieux. On n’a pas eu du tout de communication, s’ils n’avaient pas eu cette curiosité, tout cela ne serait pas arrivé.

Quelle a été ta première pensée quand tu as gagné ?

D.G. Je n’y croyais pas. D’ailleurs il y a un truc qui était vraiment énorme, on ne s’en rend pas compte sur la vidéo, mais avec les applaudissements et l’émotion, je n’ai pas entendu qu’on était deux. Quand je suis montée, j’ai commencé à vouloir parler, et tout à coup j’ai été arrêtée dans mon élan parce que j’ai compris qu’il y avait aussi Alyzée (Lalande, co-lauréate du Trophée de l’Artiste Interprète Féminine ndlr). Il y avait beaucoup d’émotion. J’ai déjà eu des prix au conservatoire, le premier prix et le prix d’honneur, c’était pareil. Tu n’y crois pas en fait.

Où as tu mis ton trophée ?

D.G. Il est chez moi, on le voit. Je l’ai pas caché. (Rires)  J’espère que ce ne sera pas le dernier prix de ma vie. Pour les prix de conservatoire, par exemple, tu n’as pas de statuette, tu as juste un papier. Je n’en suis quand même pas à encadrer mes papiers de prix parce que ce serait un peu ridicule.

Cette année, j’ai eu le prix de la meilleure comédienne dans un festival de cinéma (Festival CinEuphoria pour le court métrage Terrain Vague ndlr). Et là pareil, il n’y avait rien, je n’ai pas de traces. Donc effectivement, je peux considérer que c’est mon premier prix physique. J’espère que ce ne sera pas le dernier et que ça va me porter chance.

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Ton parcours

Qui es tu ?

D.G. Contrairement à beaucoup d’artistes pour qui ce métier a toujours été une vocation, moi pas du tout. C’était vraiment par hasard. C’est à cause, ou grâce, à un homme qui m’a dit “pourquoi tu ne ferais pas du théâtre ?” quand j’avais dix-sept ans. Je me suis inscrite dans un conservatoire, j’ai été prise et ça a changé ma vie, véritablement. J’ai un rapport très particulier à ce métier, je considère qu’il a carrément sauvé ma vie. Parce que j’ai quand même un parcours assez atypique, j’étais une grosse rebelle. Je suis une ancienne punk, donc j’ai traîné avec des gens qui n’étaient pas forcément fréquentables. (Rires).

J’avais arrêté l’école très jeune, à quatorze ans, donc la rencontre avec ce métier m’a permis de me calmer sur beaucoup de choses. Quand je suis sur scène, je suis comme un poisson dans l’eau. Alors effectivement, les prix, tout ça, ça fait plaisir. Mais je fais ce métier d’abord parce que c’est presque une raison de vivre pour moi.

Pourquoi la comédie musicale ?

D.G. La comédie musicale, c’est un peu ce que j’ai expliqué pendant mon discours, c’est aussi un hasard. C’est une copine qui m’avait dit à l’époque que Stage (Entertainment) faisait des auditions pour Cabaret. Je n’avais jamais vu de comédie musicale, du coup je n’y croyais pas du tout. À tel point que je n’ai pas envoyé ma candidature tout de suite. Mais elle a tellement insisté, elle me disait “Allez qu’est ce que tu as à perdre”. Et elle a eu raison, la preuve.

J’ai eu la chance de tomber sur une directrice de casting, Ashley Haussman, qui est très curieuse, et qui ne m’a pas fait barrage. Car il faut savoir un truc dans notre métier, c’est qu’il y a des directeurs de casting, que ce soit pour le théâtre, pour le cinéma, pour tout, qui font barrage. Qui tout à coup vont estimer, eux, que le rôle est pas pour toi. Donc si Ashley Haussman avait eu ce genre de raisonnement, tout cela ne serait pas arrivé. Au contraire, elle a eu envie, par curiosité, que je rencontre l’équipe américaine, alors que je n’avais jamais chanté, jamais dansé, rien de tout ça.

Et elle a bien fait : Ils m’ont quand même testée pendant cinq mois, à l’américaine. J’ai conscience que si ça avait été des Français, ils auraient pris mon CV et l’auraient jeté à la poubelle. Je ne suis pas « pro-ricaine », mais c’est grâce à eux. En plus, j’ai repris le métier avec ce spectacle, vu que j’ai quand même arrêté pendant sept ans.

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Je suis donc arrivée à la comédie musicale sur le tard, mais je pars du principe que quand tu joues, l’important est de travailler son personnage. Peu importe si ton personnage doit chanter, danser, jouer d’un instrument, c’est juste du travail. Je suis une bosseuse. Ce qui m’intéresse dans mon métier, c’est de pouvoir explorer des genres et des rôles très différents. Même si, pour l’instant, on me cantonne quand même souvent à des personnages qui ont beaucoup de tempérament, parce que ma personnalité amène cela naturellement.
Mais dans La Goulue, et c’est pour ça que c’est un rôle plus important que les autres pour moi – et Dieu sait si j’aimais notamment Cabaret – c’est que l’auteure m’a écrit un rôle où je montre des facettes de ma personnalité que les gens n’ont pas l’habitude de voir. Par exemple, être une vieille dame puis une petite fille de trois ans. Il y a des gens du métier qui m’ont vu dans La Goulue, même si il n’y en a pas encore beaucoup qui sont venus, et ils sont assez étonnés. “Ah tiens, elle est aussi capable de faire ça”. C’est quand même un rôle en or.
Mais je pars du principe que peu importe le rôle que tu fais, l’important c’est d’être le personnage, après il suffit de bosser en fonction de ce que l’on te demande de faire. Les Français ont du mal avec ça, mais les Américains, même dans les films, quand on leur demande de jouer une vieille, ils vont aller travailler et se transformer physiquement. Je ne fais pas ce métier pour être belle, j’aime devenir quelqu’un d’autre.
Pour Cabaret j’ai du apprendre l’accordéon alors que je n’avais jamais touché un instrument de musique de ma vie. J’ai travaillé comme une maboule jour et nuit, la danse aussi. Après, je connais mes limites. Demain on va pas me donner un rôle de chanteuse lyrique, parce que ça demanderait un immense travail de base. Il faut être un peu réaliste sur ces capacités. Je vais d’ailleurs beaucoup retravailler le chant parce que j’ai peut être enfin trouvé la personne qui me convient et que j’ai envie de progresser. Je refuse parfois d’aller à des castings car je sais que je n’ai pas le niveau en chant, et c’est dommage. 
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Quelles sont tes influences ?

D.G. Il y a d’abord ma prof de conservatoire, qui est incroyable. Elle a compris, et je pense que malheureusement ce n’est pas comme ça dans beaucoup d’écoles, que ce qui était important, c’est de faire travailler les gens en fonction de leur personnalité. J’ai fait des remplacements dans une école de comédie musicale, je ne me sentais pas très légitime, et en fait j’ai adoré ça. J’ai dit aux élèves “ce qui est important pour moi c’est votre personnalité, n’essayez pas de dénaturer ce que vous êtes, au contraire servez-vous en. Autant dans les choses positives que négatives.” Je pense que tout sert.

Après, je n’ai pas vraiment d’influences. Il y a des artistes que j’aime beaucoup, pour lesquels j’ai une admiration sans bornes, mais je n’ai jamais eu de héros ou héroïnes. J’ai de l’admiration pour des gens, pas forcément de comédies musicales d’ailleurs. Des comédiennes comme Anna Magnani, une Italienne qui est hallucinante. Dans les Françaises il y a Simone Signoret, Arletty, des femmes qui ont de vrais tempéraments, de vraies personnalités et qui ne sont pas interchangeables. Le problème aujourd’hui est que les artistes sont trop interchangeables, ils se ressemblent un peu tous. J’aime les artistes qui sont à part.

J’ai aussi beaucoup d’admiration pour des metteurs en scène, des réalisateurs, des auteurs, des théoriciens du théâtre puisque j’ai repris des études de théâtre sur le tard. Il y a un homme qui m’a beaucoup apporté c’est Robert Abirached. Il était très important dans le spectacle vivant, il a été le bras droit de Jack Lang dans les années 1980, et a fait beaucoup pour le spectacle de rue, pour les marionnettes. Il a été mon directeur de maîtrise, j’ai adoré échanger avec lui. Et puis il y a tous les gens qui m’ont marqué dans ma vie personnelle qui ne sont pas forcément des artistes.

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Quels ont été les moments marquants dans ta carrière ?

D.G. Si on reste sur la comédie musicale, je n’ai pas fait tant de spectacles que ça, mais sur des projets très longs. Cabaret ça a été trois, quatre ans de ma vie. Mozart l’Opéra Rock un peu moins puisque je n’ai pas fait la deuxième saison. La Goulue, l’air de rien ça fait depuis 2016 qu’on est sur ce projet avec l’auteure. À chaque fois, je pars du principe, puisque c’est ma passion, que je ne peux pas m’engager sur un projet de longue haleine si je ne suis pas profondément passionnée par mon personnage.

Tous mes personnages, toutes mes aventures de comédies musicales, m’ont marqué. Après effectivement Cabaret ça a été hallucinant parce que j’ai beaucoup appris. J’ai été formée si rapidement à un peu tout que de ce point de vue là ça a été très marquant. Maintenant je pense que La Goulue est le rôle le plus fort qu’on m’ait donné parce que, comme je l’expliquais, j’ai une grande palette à jouer. C’est quand même un cadeau, je ne sais pas si demain on m’écrira encore un rôle comme ça. Je l’espère tout de même.

Au niveau de l’image, comme j’ai repris le métier sur le tard, j’ai surtout fait de la télé, je n’ai jamais passé de casting pour le cinéma. Il faut quand même savoir que c’est un milieu très fermé. Les directeurs de casting ont du mal avec les comédiens de théâtre, quand ils ne sont pas connus en tout cas. En revanche pour la télé j’ai fait des séries, des unitaires, des choses comme ça. J’ai surtout aimé travailler avec les réalisateurs. J’ai fait deux projets dernièrement avec un réalisateur que j’aime beaucoup qui s’appelle Christian Faure, qui fait de la télé un peu engagée. J’ai adoré travailler avec tous les réalisateurs qui m’ont choisie. Les rôles que j’ai eus à la télé ne m’ont pas tous passionnée, soyons clairs, mais à partir du moment où j’accepte quelque chose je le fais avec cœur et sérieusement, sinon je le fais pas. Je fonctionne comme ça.

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Ton avenir

What’s next en 2018/2019 ?

D.G. Déjà on reprend La Goulue. On a joué à guichet fermé sur les dernières. On a eu trois T dans Télérama, et je pensais pas que ça aurait un impact aussi important. C’est fou. Et puis Les Trophées effectivement ont mis une lumière extrêmement importante. Donc là on reprend, je considère que c’est encore un peu une création parce que j’ai pas encore les moyens de pouvoir la faire s’envoler comme je voudrais. J’espère que pour cette reprise les producteurs vont enfin venir, parce que c’est un peu le but aussi.

Et je suis sur un prochain projet avec l’auteure, Delphine Gusteau, qui m’a écrit un nouveau texte. C’est un texte extraordinaire, qui ne sera pas musical, un seule en scène. Je n’en dis pas plus pour le moment. J’ai aussi l’envie aussi de rejouer avec des gens. J’ai donc contacté un metteur en scène que j’aime beaucoup, dont je tairai le nom, qui a un texte que j’aime beaucoup, dont je tairai le nom aussi, pour pouvoir rejouer avec des camarades parce que c’est agréable. Même si mon partenaire de scène Mathieu (Michard), est comme un comédien, j’ai envie de retravailler avec plusieurs comédiens.

Le problème dans ce métier c’est que les projets sont très longs à se monter. Mais j’ai plein d’idées. En plus il y a une compagnie qui a été montée pour La Goulue, dont je suis un peu la directrice artistique. Je suis également en train d’écrire de mon côté, je ne sais pas si j’ai le talent pour cela mais des idées j’en ai plein, donc j’écris.

Et ensuite ? Delphine Grandsart dans quelques années ?

D.G. C’est compliqué comme question. Tout ce que je me souhaite c’est de pouvoir me regarder dans la glace, de toujours être autant passionnée par ce métier. De ne pas le faire pour « cachetonner »,  plein le font malheureusement. Et je ne leur jette pas la pierre parce qu’il faut bien bouffer. En tout cas si je continue à faire ce métier c’est parce que j’aurai à défendre des beaux rôles, avec des gens que j’aime, dont j’estime le travail. Parce qu’on fait pas ce métier pour se faire chier, sinon je préfère arrêter.

Surtout après avoir porté à bout de bras ce projet, je me vois pas retomber à travailler avec des gens qui ne vont pas me plaire, sur des rôles qui ne vont pas me plaire. Je ne l’ai jamais fait, et ce n’est pas aujourd’hui que je vais commencer. Pas maintenant que j’ai connu cette aventure incroyable. Il y a encore plein d’artistes avec lesquels j’ai envie de travailler, mais ils ne connaissent pas encore bien mon travail. Je les invite d’ailleurs, et j’espère qu’ils viendront me voir pour pouvoir collaborer avec eux après. Je me souhaite de continuer à être toujours passionnée par ce métier, et de faire des rencontres humaines, fortes, intenses et riches.

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Image de Romain Lambert

Romain Lambert

Membre de Musical Avenue depuis juin 2012, je suis passionné bien évidemment de comédies musicales mais aussi de ballets. Je passe la majorité de mes soirées entre l'Opéra Garnier, Bastille et le Théâtre du Châtelet. Je voue un véritable culte a Stephen Sondheim et j'essaye de chanter "Glitter and be Gay" sous la douche.
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